Et voici encore des mots
qui veulent retentir
alors que le silence
s’impose
et qu’il veut être obéi
Je ne sais plus rien
que ce moindre vent
ces nuages lourdauds
ce soleil infidèle cette nuit monotone
que des étoiles identiques
immobilisent
Il n’y a plus de signaux
plus de ces grands moments
où l’on se croit vainqueur
d’un monde
mais plutôt cette lenteur définitive
cette absurdité plate comme la mer incertaine
et tout ce grand déballage
qu’un cri salue
jusqu’au dernier moment
celui du naufrage
et de la délivrance
J’écoute un rire
qui s’éloigne et qui démolit
ce grand échafaudage ridicule
Voici le bonheur
des secondes et du jour
du grand jour vide
où l’on dit adieu
à ce qui était
le courage
et la vérité à travers les siècles
il est temps
une nuit et une autre nuit
Je sais que je ne puis rien entendre
et j’écoute
les secondes s’éloignent dans l’ombre
Il y a un océan
Philippe Soupault, 1936